J’aime beaucoup les sons raclés, comme celui d’un bâton que l’on glisse le long
d’un grillage, un doigt qui frotte un égouttoir en bois ou un ongle qui gratte du
carton ondulé. Dans cette pièce le son denté sur les instruments à cordes
fonctionne comme un habit que l’on met ou on enlève.
Parfois le son denté s’empare de tout l’orchestre, donnant l’impression d’une
masse glacée qui fond peu à peu. D’autres fois l’orchestre devient un terrain
rugueux sur lequel des instruments solistes dessinent des figures avec un timbre
lisse. La musique est tantôt fluide et organique, tantôt rythmique et machinal.
Cette opposition crée, pour moi, un sens paradoxale et me rappelle certains
proverbes qui pourraient surgir de la bouche d’un fou ou d’un enfant pour
déchiffrer le monde (ce qui est et ce qui n’est pas).
2022


